Icône, Chemin du Silence

L’ICONE, CHEMIN DU SILENCE

L’icône doit être abordée dans la prière ; elle est entre les mains de Dieu. Elle est la présence même de cette réalité : cultiver l’image de Dieu en nous pour ensuite la laisser dessiner sur la planche. Quoique nous fassions, quoique nous disions, nous restons entre les mains de Dieu. Et ces mains qui nous tiennent, ces mains qui nous guident sur notre chemin, sont celles-mêmes qui guident l’iconographe dans son travail. Tout iconographe doit être un « moine intérieur », et le moment où l’on peint est le moment où le temps est brisé, où l’on rencontre l’éternité. Voilà pourquoi le temps de l’écriture de l’icône est par excellence le temps de la prière, car il est la rencontre avec Dieu, avec l’éternel.

L’apprentissage de l’écriture de l’icône est une véritable aventure intérieure qui dilate le cœur et ouvre les yeux sur le « monde de Dieu » : le ciel et la terre, le visible et l’invisible, le passé, le présent et l’avenir. Il permet à l’homme moderne occidental de redécouvrir les valeurs symboliques du sacré et des sacrements, non de façon superficielle ou abstraite qui s’adresse seulement à son intellect, mais d’une façon profonde pour nourrir son âme et son esprit et pour donner un sens à sa vie : apprendre à peindre une icône, c’est apprendre à pénétrer le mystère de sa propre vie. C’est aussi venir au secours d’autrui par l’incessante prière qui régit toute son élaboration, c’est vouloir participer à la sauvegarde de la Création, c’est « militer » dans le silence et le recueillement de son cœur pour un monde meilleur. C’est devenir « homme d’action » dans le silence et la contemplation.

L’écriture de l’icône ne peut être donc envisagée comme un loisir ou un simple passe-temps, ni même comme une peinture à thème religieux, mais comme un véritable apprentissage intérieur et un chemin spirituel. Le travail de l’iconographe est donc un travail de silence, de prière et de solitude. Son but est de transmettre à travers l’icône sa ferveur spirituelle, et de vivre et d’exprimer sa foi à travers elle.

De tout temps les iconographes se sont regroupés en « ateliers », tout comme les Compagnons du Moyen-âge, non seulement pour recevoir un enseignement ou pouvoir mieux « pratiquer » l’abnégation de soi, par humilité et véritable anonymat, mais surtout afin que le peintre d’icônes isolé ne puisse commettre des erreurs dogmatiques. Le regroupement permet une certaine vérification et obéissance à la Tradition, c’est-à-dire à ceux qui nous ont précédés dans la Vérité. L’iconographe ne peut faire cavalier seul : c’est pourquoi, également, l’iconographe reçoit son « ministère » de l’église. C’est au sein de la communauté ecclésiale qu’il remplit pleinement sa fonction. Il est au service de l’embellissement de la Maison de Dieu. Il dépend de cette Maison. Tout atelier doit être œuvre de l’église et dépendre de l’église. Le peintre d’icônes n’est ni artiste, ni artisan indépendant ; il exerce un ministère de l’église.

. Texte de Ludmilla Garrigou Titchenkova, fondatrice de l’Atelier.

Revenir en haut